Faisant suite à une publication sur Facebook du lanceur d’alerte Nzui Manto évoquant un cas de variole du singe à Yaoundé, nous avons effectué des vérifications et sommes arrivés au résultat selon lequel cette allégation est fausse…
Contexte
Dans une publication faite le jeudi 6 Mars 2025 sur la page Facebook du lanceur d’alerte Nzui Manto, il est écrit : « Publié tel que reçu! “Bonjour grand frère … ma petite sœur souffre de la variole de singes depuis plus de 4 jours, la maladie se développe tellement vite, nous sommes partis à l’hôpital des Sœurs à Yaoundé Mvolyé, c’est de là que le docteur a confirmé qu’il s’agit de la variole de singes, les médicaments qu’il nous a prescrit n’aident vraiment pas ma petite sœur, elle n’a que 9 ans, la maladie ne fait que se développer, j’ai écrit au ministère de la santé publique via Messenger, je n’ai pas encore reçu de réponse, c’est pourquoi je vous en supplie de nous aider en divulguant sur votre page ce cas rare de maladie qui est déjà arrivée au Cameroun »
Cette publication qui a enregistré en moins d’une semaine plus de 8000 likes, 2000 commentaires et 904 partages est faite dans un contexte dans lequel le Ministre de la Santé Publique du Cameroun, Dr Manaouda Malachie avait déclaré le 13 août 2024 dans un communiqué de presse que la variole du singe (appelée autrement Mpox) était une urgence de “santé publique de portée continentale”. En 2024, 30 cas suspectés de cette maladie qui se transmet principalement de l’animal à l’homme à travers les rongeurs, ont été enregistrés au Cameroun avec 02 décès confirmés.
Processus de Vérification
Pour savoir si un nouveau cas de Mpox a été détecté au Cameroun, nous avons joint par appels téléphoniques et par messagerie WhatsApp le Médecin qui a reçu la mère et sa fille de 9 ans à l’hôpital des Soeurs à Mvolyé (Yaoundé), le Dr Macken Chatriand confirme : “En effet j’ai reçu cette dame et sa fille le 04 Mars 2025, ils sont d’ailleurs enregistré dans nos archives.” Toutefois, contrairement à ce qui est dit sur les réseaux sociaux, il précise que la variole de singe n’a pas été diagnostiquée “Je n’ai jamais diagnostiqué que la petite fille souffrait du MPOX encore appelé la variole du Singe et le carnet est là si vous avez des doutes (nous ne pouvons le publier à cause du secret médical). Il finit par ajouter «…aucun personnel de santé ne peut vous laisser sortir de l’hôpital s’il détecte en vous cette maladie ».
Dans nos investigations, nous avons pu entrer en contact avec la maman de la fille qui nous atteste que l’assertion qui circule en ligne est de l’initiative exclusive du grand frère de la malade qui n’était pas présent lors de la consultation à l’hôpital. D’ailleurs le Dr Macken confirme lors de notre entretien “je n’ai jamais rencontré son grand frère, je ne le connais même pas. Ni de nom, ni de visage”.
Le 10 Mars 2025, par appel téléphonique et par messagerie Whatsapp également nous avons échangé avec Angono Stéphane, le grand frère de la malade, qui confirme être celui qui a envoyé le message au lanceur d’alerte Nzui Manto. A la question de savoir comment il a fait pour avoir l’information selon laquelle sa sœur était atteinte de la variole du singe, il répondit : « Ma mère est partie avec ma petite sœur à l’hôpital des sœurs de Mvolyé le 04 Mars 2025, elle avait des boutons qui sortaient sur tout sur son corps, le médecin a prescrit des examens et des médicaments pour la varicelle. Étant donné que le lendemain les boutons ne disparaissaient pas, j’ai essayé de faire des recherches sur la variole du singe. Sachant que cette maladie sévit dans les pays voisins, j’ai immédiatement contacté NZUI MANTO pour qu’il m’aide à faire parvenir l’information auprès de la haute hiérarchie sanitaire » affirme t’il. Il renchérit en apportant des précisions suivantes : « Ce n’est pas le Docteur qui a reçu ma mère et ma petite sœur qui a dit qu’elle avait la variole du singe, il n’a jamais dit qu’il s’agissait du MPOX, ce sont mes recherches personnel sur internet qui m’ont fait penser cela ».
Dans un entretien physique avec la Sœur NNADOZIE Helen mercredi 11 mars 2025, responsable de ce centre de santé, elle affirme en effet qu’aucun cas de Mpox n’a été détecté dans son centre de santé. Nous apprenons sur place que la rumeur de cette ‘information’ devenue très virale est parvenue au chef de district de santé d’Efoulan Dr Georges Marie OTTOU AWA qui a immédiatement mobilisé ses services compétents pour une prise en charge hospitalière et communautaire adéquate et une investigation approfondie. Sur les lieux, un prélèvement a été fait, la mère et la fille ont été placées en quarantaine par les services du Ministère de la Santé par simple mesure de précaution le temps de refaire des examens au Centre Pasteur de Yaoundé.
Les résultats du prélèvement effectué par le Centre Pasteur sont sortis dans la soirée du 10 Mars aux environs de 18h démontrant qu’il y’a aucune trace de l’orthopoxvirus simien qui provoque la maladie du Mpox. Ces résultats corroborent le diagnostic mené quelques jours auparavant par le Dr Macken. Dans le cadre de cet article et pour démystifier une fausse rumeur et dissiper les craintes du public, il nous a été permis de publier lesdits résultats (image ci-dessous).
Pour avoir une idée plus claire sur les causes, symptômes/manifestations et éventuelles conséquences de cette maladie, nous avons contacté le 10 Mars 2025, Thierry Didier KUICHEU le responsable de la communication digitale du programme National de Prévention et de lutte contre les Zoonoses Émergentes et Réémergentes du Ministère de la Santé publique du Cameroun qui nous a mis en relation avec le Dr YAYA Erick. En effet, selon le Dr YAYA Erick, « La variole du singe ou Mpox est une maladie infectieuse causée par un virus du genre Orthopoxvirus. Le Mpox peut être transmis de l’homme à l’animal et vice versa. Elle se manifeste par l’apparition d’une éruption cutanée généralisée précédée par la fièvre et parfois des tuméfactions des ganglions ». A la question de savoir comment reconnaître une personne atteinte de variole du singe il s’exprime « Une personne qui a fait de la fièvre, Elle a des éruptions cutanées sur tout le corps y compris les paumes des mains et la plante des pieds (la particularité de cette maladie par rapport à la varicelle). Les éruptions sont comme des boutons contenant du liquide ou du pus. Il peut y avoir un gonflement des ganglions ».
Selon l’OMS, il est donné des recommandations pour se protéger contre la variole du singe :
- Évitez les contacts étroits (y compris sexuels) avec toute personne atteinte de mpox.
- Lavez-vous régulièrement les mains à l’eau et au savon ou avec un gel hydroalcoolique.
- Si vous pensez avoir contracté la maladie, pour éviter de transmettre le virus, protégez en vous isolant jusqu’à ce qu’un examen médical ou un test de détection aient été réalisés et jusqu’à ce que des croûtes se soient formées sur vos lésions, qu’elles soient tombées et qu’une nouvelle couche de peau se soit formée dessous.
A ce jour, à l’absence de traitement suffisamment fiable, l’OMS recommande l’utilisation des vaccins MVA-BN ou CL16 pour les personnes à risque en cas de flambée de mpox. Le vaccin ACAM2000 peut également être utilisé chez certaines personnes après une évaluation individuelle lorsque d’autres vaccins ne sont pas disponibles.
Verdict
Au terme de notre vérification, nous pouvons affirmer avec certitude que l’allégation selon laquelle le MPOX encore appelé variole du singe a été diagnostiquée au Centre Médical Saint Esprit de Mvolyé à Yaoundé est fausse. Les résultats du Centre Pasteur entérinent le diagnostic effectué par le Dr MACKEN Chatriand et les informations données par les différentes sources contactées. Il est à rappeler toutefois que partager une information sans vérifier ou sans s’appuyer sur des preuves intangibles peut nuire irréversiblement à la réputation d’un individu ou d’une institution à l’instar du Centre de Santé Saint Esprit de Mvolyé qui existe depuis plus de 100 ans et dont les responsables ont tenu à préciser que leur professionnalisme et rigueur dans le travail restent une priorité. Ce qui lui a valu une reconnaissance en lui faisant passer de centre de santé à Centre Médical, selon l’Arrêté N 0272/A/MINSANTE/SG/DOSTS/SDOS/SFSP.
